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Marie Gernigon : comprendre et optimiser la performance physique de tous et toutes

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 25 novembre 2022 , mis à jour le 18 janvier 2023

Marie Gernigon est enseignante-chercheuse à l’Université Paris-Saclay, maîtresse de conférences au laboratoire Complexité, innovation et activités motrices et sportives (CIAMS – Univ. Paris-Saclay, Univ. d’Orléans) et directrice-adjointe Formation de la Graduate School Sport, mouvement, facteurs humains. Spécialiste de la physiologie de l’exercice et des adaptations cardio-vasculaires à l’effort, elle mène des recherches qui s’intéressent aussi bien à la personne entraînée qu’à celle en situation de handicap.

Marie Gernigon s’engage un peu par hasard en licence de sciences et techniques des activités physiques et sportives (STAPS) - Activité physique adaptée (APA) à l’Université de Montpellier. En troisième année, elle part en stage au sein du Centre for Sport and Exercise Sciences de l’Anglia Ruskin University (Cambridge, Royaume-Uni). De 2008 à 2011, elle est assistante de recherche, approfondit ses connaissances en physiologie de l’exercice et acquiert une double compétence APA/performance auprès de deux chercheurs, l’un en France, l’autre en Angleterre. « Mes travaux étaient encadrés par Alain Varray, physiologiste de l’exercice à l’UFR STAPS de Montpellier, spécialiste des pathologies respiratoires et président de l’Association francophone en activité physique adaptée (AFAPA), et par Dan Gordon, physiologiste spécialisé dans les adaptations cardiorespiratoires à l’effort », raconte Marie Gernigon. Durant cette expérience, elle s’intéresse aux adaptations cardiorespiratoires à l’effort maximal et aux facteurs limitant la performance maximale.

 

Des GPS à l’hôpital

Après un master de Réhabilitation par les activités physiques adaptées (RAPA), obtenu à l’Université de Montpellier, et de retour d’Angleterre, elle intègre le centre hospitalier universitaire (CHU) d’Angers comme ingénieure de recherche hospitalière, dans le service de Pierre Abraham. Alors qu’elle est chargée des protocoles de recherche clinique au sein de l’unité des explorations fonctionnelles à l’effort, elle décide de poursuivre ses travaux en doctorat sous la direction de ce spécialiste de médecine du sport. « Mes recherches consistaient à caractériser la marche de patientes et patients présentant une artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI). Cette maladie vasculaire périphérique, notamment liée au développement d’une plaque d’athérome au niveau des jambes, induit un déficit en sang oxygéné au niveau des muscles effecteurs de la marche, ce qui engendre des fourmillements et de fortes douleurs qui obligent les personnes à s’arrêter de marcher », détaille Marie Gernigon.

La distance de marche maximale parcourue par les patientes et patients est déterminante car elle oriente vers une revascularisation. Pour caractériser leur marche, l’équipe décide de comparer la performance du GPS au test de référence sur tapis roulant. « Cette méthode simple a bien fonctionné et a montré qu’il est possible de ne pas faire venir à l’hôpital les personnes qui habitent loin pour effectuer un test de marche », affirme Marie Gernigon. Après sa thèse, soutenue en 2015 à l’université d’Angers, elle retourne à Montpellier où elle obtient un poste d’attachée temporaire d'enseignement et de recherche (ATER) à l’UFR STAPS de l’Université de Montpellier. Elle est attachée au laboratoire EuroMov et y restera deux ans avant d’être recrutée, en 2017, comme maîtresse de conférences à la Faculté des sciences du sport de l’Université Paris-Saclay et au laboratoire CIAMS.

 

Des garrots pour améliorer la performance 

Avec François Cottin, physiologiste spécialisé dans l’analyse de la variabilité des signaux cardiovasculaires et doyen de la Faculté des sciences du sport, Marie Gernigon co-encadre aujourd’hui la thèse de Julien Desanlis. Son collègue Dan Gordon participe également aux recherches. « Nous assistons actuellement à un phénomène de plus en plus répandu chez les sportifs : ils et elles se font appliquer des garrots pendant l’entraînement ou lors de la phase de récupération. En exerçant une pression qui réduit partiellement le flux sanguin, l’idée est de stimuler l’angiogenèse, c’est-à-dire les facteurs qui développent le réseau vasculaire. Il semblerait que cette méthode d’entraînement permette d’accroitre l’oxygénation des muscles effecteurs de l’exercice. On observerait également un gain de force et de masse musculaire. Cela peut donc potentiellement être utilisé en post-chirurgie chez le sportif (réathlétisation) ou à l’entraînement (optimisation de la performance/récupération). »

L’objectif des recherches est donc de mesurer véritablement les effets de cette méthode. « Lors de différents protocoles à l’effort, nous étudions la variabilité cardiaque et les adaptations vasculaires à l’aide de boitiers qui mesurent la perfusion dioxygène par spectrométrie dans le proche infrarouge (NIRS) au niveau des muscles. Nous observons aussi la consommation en dioxygène à l’aide d’un analyseur d’échanges gazeux. Le but est de savoir si oui ou non nous assistons à une amélioration du statut cardiovasculaire et respiratoire, et si cela s’accompagne d’une amélioration de la performance ». Une première publication est parue à l’été 2022.

 

Des travaux pratiques au sein du laboratoire

Pour Marie Gernigon, recherche et pédagogie sont intimement liées. « On ne peut pas avoir de bonnes étudiantes et de bons étudiants en master et en doctorat si on ne les prépare pas bien dès la première année de licence. » Responsable des enseignements de physiologie et de la licence mention « Activité physique adaptée - santé » (APA-S), elle a participé, avec l’équipe pédagogique, à l’élaboration et à la mise en place de travaux pratiques (TP) au laboratoire dès la deuxième année de licence. Les étudiantes et étudiants, réunis en petits groupes, apprennent à évaluer un usager dans la perspective d’un programme de réhabilitation. « Nous faisons vivre les concepts de physiologie, biomécanique, contrôle moteur et de psychologie abordés en amphi. Pour cela, nous utilisons des approches de terrain et de laboratoire, comme l’analyse d’échanges gazeux avec la caractérisation de la réponse ventilatoire. Les groupes étudient comment un corps efficient fonctionne à l’effort pour mieux comprendre les adaptations d’un corps déficient (pathologique) à l’exercice. De plus, ces TP confrontent les étudiantes et étudiants à des réalités professionnelles très variables et leur font appréhender les évaluations avec et sans le matériel de laboratoire (cycloergomètre, haltères, tapis, centrales inertielles, kits de simulation de handicap…). »

Directrice-adjointe Formation de la Graduate School Sport, mouvement, facteurs humains depuis 2021, Marie Gernigon veille à adapter les enseignements de master et leur adossement à la recherche. « Nous soutenons les projets pédagogiques innovants et transversaux afin d’en faire bénéficier l’ensemble des mentions et parcours. » La Graduate School couvre cinq mentions de master pour 500 étudiantes et étudiants. Promouvoir la mobilité (EUGLOH, les bourses de stage à l'international, mobilités Erasmus) fait également partie de ses priorités. Communautés étudiante et enseignante du master Vieillissement et handicap : mouvement et adaptation (VHMA) embarquent fin novembre 2022 pour Stoke Mandeville (Angleterre), le berceau du mouvement paralympique, et trois jours d’échanges autour de l’accessibilité et de l’activité physique adaptée. « Nous allons même jouer au rugby en fauteuil avec quelques anciens membres de l’équipe paralympique britannique ! », se réjouit l’enseignante-chercheuse. Après la dernière cérémonie de remise de diplômes de la Graduate School, en septembre 2022, d’autres événements fédérateurs sont prévus sur l’année universitaire 2022/2023, comme le workshop annuel sur le thème des activités physiques et du sport pour tous et toutes et de l’inclusion de tous les publics.

« Mon rôle consiste à accompagner mes collègues qui connaissent très bien leurs réseaux et leurs partenaires. Nous partageons la même motivation pour former nos étudiantes et étudiants, et les voir réussir dans leurs projets professionnels. »