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Karim Fizazi : Vers la guérison des cancers masculins

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 24 novembre 2019 , mis à jour le 07 mai 2021

Karim Fizazi est oncologue médical à l’institut de cancérologie Gustave Roussy, au sein de l’unité Biomarqueurs et nouvelles stratégies thérapeutiques (Université Paris-Saclay, Institut Gustave Roussy, Université Paris-Sud, Inserm) et professeur en cancérologie à l'université Paris-Saclay. Il est à l’origine de la découverte de thérapies innovantes pour le traitement des cancers masculins avec, pour la première fois depuis des décennies, l’espoir d’une vie plus longue pour nombre de patients.

À la tête de plusieurs études majeures en oncologie, Karim Fizazi révolutionne depuis dix ans la prise en charge et le traitement des patients atteints de cancers masculins, comme celui des testicules touchant des hommes jeunes, ou celui de la prostate. « Avec 50 000 nouveaux cas par an et 8 000 patients qui en décèdent, le cancer de la prostate est de loin le cancer le plus fréquent chez l’homme, explique l’oncologue médical, de l’unité Biomarqueurs et nouvelles stratégies thérapeutiques de Gustave Roussy. Or, une minorité des patients ont d’emblée des métastases, en particulier au niveau des os. Pendant 70 ans, le même traitement hormonal leur a été administré. »

 

La découverte de nouvelles thérapies

En 2017, Karim Fizazi teste une nouvelle thérapie sur 1 200 patients atteints du cancer de la prostate métastatique dans 134 pays. La moitié d’entre eux reçoit l’hormonothérapie traditionnelle et à l’autre moitié, on administre en plus un nouveau médicament : l’abiratérone. « Il s’agit d’une hormonothérapie de nouvelle génération qui fait baisser tous les androgènes, mais nous avons découvert qu’elle empêche également les cellules cancéreuses de fabriquer ces composés. » Associé à l’hormonothérapie traditionnelle, ce médicament forme un cocktail thérapeutique qui permet de réduire de 35 % les risques de décès et double le délai de survie sans progression du cancer. « Ces résultats spectaculaires ont changé la prise en charge des patients », se félicite le médecin. Il vient tout juste de montrer qu’un autre médicament, le darolutamide, est également très efficace chez les hommes dont le cancer échappe à l’hormonothérapie traditionnelle et qui n’ont pas de métastases. Il vient également de co-signer les résultats d’une étude qui ouvre la voie d’une nouvelle thérapie pour ces patients. « 20 % d’entre eux sont porteurs de cancers dus à un défaut de réparation de l’ADN, car certains gènes sont mutés. Or nous venons de prouver que chez ces hommes, l’olaparib, un inhibiteur de la protéine poly(ADP-ribose) polymérase (PARP) impliquée dans la réparation de l’ADN, est clairement efficace en cas d’échec des traitements traditionnels ».

 

Rendre service à l’humanité

Auteur de plus de 300 publications, Karim Fizazi fait partie des 1 000 scientifiques les plus cités au monde, heureux d’avoir atteint l’objectif qu’il s’était fixé jeune interne en médecine : « À 25 ans, j’avais déjà l’espoir d’inventer de nouveaux médicaments pour soigner les cancers. À l’époque, la cancérologie était un véritable challenge, les traitements se bornant à de la chimiothérapie. Aujourd’hui, cette spécialité bouge tous les deux ou trois ans ». Médecin et chercheur, ces deux métiers en un - « le plus beau du monde » - lui procurent « deux grands bonheurs distincts » : d’abord au niveau individuel, « avec l’immense satisfaction de guérir un patient atteint d’un cancer du testicule métastatique grave et de lui donner 50 ans de plus à vivre », puis à l’échelon collectif, avec le sentiment « d’avoir rendu service grâce aux retours de mes collègues du monde entier, dont les patients sont en rémission complète depuis des années ».

 

Enseigner, partager

Professeur à l’université Paris-Sud depuis 2009, Karim Fizazi « adore » enseigner. Il est également attentif à la vulgarisation de ses recherches. « Autant on parle ouvertement des cancers féminins, autant on aborde peu les cancers masculins car ils tournent autour de sujets sensibles, comme la sexualité ou la fertilité. » À force de voir des hommes complètement perdus face à leur maladie, Karim Fizazi œuvre pour la création de la première association de patients atteints de cancers masculins : depuis 2015, CERHOM développe des actions d’information, de sensibilisation et d’entraide. Il participera prochainement à une émission grand public programmée par une grande chaîne nationale et parrainée par des stars du cinéma français.

 


Études cliniques réalisées en oncologie :

  • Rôle du denosumab dans la prévention des complications des métastases osseuses du cancer de la prostate, 2010.
  • Nouveau standard de traitement pour les jeunes patients atteints d’un cancer grave du testicule (étude GETUG 13), 2014.
  • Étude LATITUDE qui modifie le traitement des patients atteint d’un cancer de la prostate métastatique, 2017.
  • Étude ARAMIS qui modifie le traitement du cancer de la prostate résistant à la castration non métastatique, 2019.

Le Pr Fizazi a mis également en place le Prostate Cancer Consortium in Europe (PEACE) et dirige les deux premiers grands essais cliniques européens de phase III : PEACE-1 et PEACE-2.