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EndoVx : Améliorer la prise en charge des lésions de l’aorte

Recherche Article publié le 14 avril 2022 , mis à jour le 14 avril 2022

Issu de développements antérieurs réalisés par des chercheurs et chercheuses du service de chirurgie aortique et vasculaire de l’hôpital Marie Lannelongue, et de collaborateurs et collaboratrices privées, le projet EndoVx vise le développement d’une plateforme qui améliore la détection et les traitements des anévrismes aortiques. 

L’aorte est la plus grosse artère du corps humain. Elle traverse le thorax, depuis le cœur jusqu’à l’abdomen, et irrigue en sang tout l’organisme. Elle est primordiale au bon fonctionnement du corps humain. Sa dilatation, ou anévrisme, si elle n’est pas traitée à temps, débouche sur une rupture de la paroi de l’aorte. Ce qui, dans quatre-vingt-dix pour cent des cas, entraîne le décès de la personne. Des techniques de détection de la dilatation et des traitements existent, mais leur fiabilité et leur temps de mise en œuvre sont toutefois limités. Le projet EndoVx cherche justement à faire progresser la prise en charge des anévrismes aortiques. Lauréat de l’appel à projets de recherche hospitalo-universitaire en santé (RHU), qui finance des projets de recherche aux frontières entre thématiques fondamentales et cliniques, EndoVx propose une plateforme pour une prise en charge plus rapide et individualisée des anévrismes de l’aorte. Le projet mélange techniques d’intelligence artificielle, de modélisation numérique et d’impression 3D. À sa tête : Stéphan Haulon, professeur de chirurgie vasculaire à l’Université Paris-Saclay, chirurgien et chef du service de chirurgie cardiaque et vasculaire à l’Hôpital Marie Lannelongue. 


Deux modes d’intervention curative : chirurgicale ou endovasculaire

Il existe deux modes de traitement curatif des anévrismes de l’aorte. Le premier, dit « chirurgical », est invasif : il implique des incisions, comme la laparotomie de l’abdomen ou la thoracotomie au niveau du thorax. Le second est « endovasculaire » : la procédure est moins invasive que la réparation chirurgicale et vise à implanter une endoprothèse par les vaisseaux sanguins. L’insertion d’une telle aorte synthétique à l’intérieur de l’aorte malade vient faciliter la circulation du sang. Pour ce traitement, deux types d’endoprothèses existent : les prothèses standards, à forme unique, et les prothèses faites sur mesure, adaptées aux anévrismes complexes, c’est-à-dire aux anévrismes localisés au niveau de la naissance des artères vers les reins et les viscères. 


La plateforme d’intelligence artificielle ARVA

Pour faire progresser le traitement des anévrismes de l’aorte, Stéphan Haulon et ses collègues impliqués dans le projet EndoVx s’appuient sur une plateforme d’intelligence artificielle qu’ils ont développée : la plateforme ARVA (Augmented Radiology for Vascular Aneurysm), qui analyse automatiquement les images de l’aorte. Elle fournit une mesure automatique et standard du diamètre externe à un instant donné. Cette mesure est cruciale dans le traitement de la maladie aortique car elle renseigne sur le moment le plus opportun pour réaliser une intervention chirurgicale, en fonction de la taille de l’aorte. Elle assure également une surveillance automatique de l’aorte afin de détecter si des réductions ou des élargissements ont lieu après le traitement. 


Vers de nouveaux modes de fabrication des endoprothèses

Une autre ambition du projet est d’améliorer la conception et la fabrication des aortes synthétiques. Stéphan Haulon soulève un problème important : « Aujourd’hui, leur fabrication s’apparente à de la haute couture, elle peut prendre plusieurs mois. Et comme ces endoprothèses sont fabriquées en Australie, cela accroît encore les délais de réception ». Aujourd’hui, la fabrication prend entre deux à cinq mois. Dans le cadre d’EndoVx, l’équipe de chercheurs et de chercheuses proposent une alternative : leur idée est de produire ces prothèses par imprimante 3D. Le temps de fabrication passera alors à dix jours environ. Les endoprothèses obtenus par ce biais seront également plus précises et faites sur mesure à l’aorte d’un ou d’une patiente. 

Un projet collaboratif et fédérateur 

EndoVx est le fruit de plusieurs années de recherches collaboratives entre les mondes académique et entrepreneurial. « Avec mon équipe, nous collaborions sur différents projets avec plusieurs acteurs et actrices du domaine sans que ces personnes ne soient en relation. L’ambition d’EndoVx est de rassembler tout ce monde et d’associer directement chaque partie prenante », décrit Stéphan Haulon. Parmi elles, la start-up Incepto avec laquelle l’équipe de Stéphan Haulon a développé l’algorithme ARVA. Née en 2018, Incepto développe des plateformes pour l’imagerie médicale à l’aide de l’intelligence artificielle. La start-up Predisurge est également impliquée dans le projet, via la simulation numérique des endoprothèses. Il s’agit de confirmer numériquement si l’endoprothèse proposée s’adapte bien à l’aorte analysée automatiquement par la plateforme ARVA, et de proposer une conception automatique de l’endoprothèse.  Medlab intervient quant à elle dans l’impression 3D de ces aortes synthétiques. Cette entreprise est spécialiste de l’impression au nitinol, un composant essentiel de l’endoprothèse, et dans l’impression d’implants orthopédiques. Outre sa structure métallique en nitinol, l’aorte synthétique contient également du plastique PTFE (également appelé Téflon®). Ce sont les scientifiques de l’Institut Charles Gerhardt Montpellier (ICGM) qui fournissent leur expertise pour associer le PTFE à l’impression 3D. 


Une portée plus large

Outre ses ambitions premières, EndoVx affiche également d’autres objectifs, plus secondaires mais non négligeables pour autant. Il participe notamment à former les étudiantes et étudiants en médecine aux techniques mini-invasives en conditions réelles. Les modèles d’aorte synthétique obtenus par impression 3D miment les conditions d’une intervention sur une aorte en bloc opératoire, ce qui permet ici aux étudiantes et étudiants de s’entraîner en tout sécurité à une opération. Aussi, ces modèles améliorent les conditions mêmes de l’opération. Grâce à l’intelligence artificielle et aux informations plus précises quant à l’aspect de l’aorte, il n’est plus nécessaire de recourir aux rayons X et aux produits de contrastes, toxiques pour les reins, pour voir à l’intérieur des vaisseaux. Enfin, les technologies développées dans le cadre du projet EndoVx réduisent drastiquement les expérimentations animales, au profit d’expériences sur les modèles d’impression 3D. Une plus-value pour le bien-être animal et pour la recherche en elle-même, car le modèle d’aorte synthétique obtenu par impression 3D est bien plus proche de l’anatomie humaine que ne le sera jamais le modèle animal.


Référence :

Chloé Adam, Dominique Fabre, Justine Mougin, Marc Zins, Arshid Azarine, Roberto Ardon, Gaspard d’Assignies, Stephan Haulon. Pre-surgical and Post-surgical Aortic Aneurysm Maximum Diameter Measurement: Full Automation by Artificial Intelligence. Eur J Vasc Endovasc Surg (2021) 62, 869-877.