Aller au contenu principal

Bruno Robert : quand les technologies solaires s’inspirent des plantes

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 24 novembre 2019 , mis à jour le 07 mai 2021

Bruno Robert est responsable du département biochimie, biophysique et biologie structurale de l’Institut de biologie intégrative de la cellule (I2BC – Université Paris-Saclay, CEA, CNRS, Université Paris-Sud) et directeur du Laboratoire bioénergétique, métalloprotéines et stress (Institut Joliot du CEA) depuis 2004. Physicien à l’interface de la biologie, il étudie depuis trente ans l’extraordinaire capacité des plantes à convertir l’énergie lumineuse en énergie chimique. Uniques au monde, ses méthodes lui permettent de percer les mystères de la photosynthèse dès ses premières étapes et d’imaginer de nouvelles sources d’énergies renouvelables.

Les études sur les mécanismes de la photosynthèse connaissent, depuis ces dernières années, un bon en avant, notamment en raison du réchauffement climatique et de la recherche d’énergies alternatives comme l’énergie solaire. Cette réaction bioénergétique, qui se déroule chez les plantes et consiste en la conversion de l’énergie lumineuse du soleil en énergie chimique, se situe au cœur des travaux de Bruno Robert depuis les années 80. « Pour satisfaire les besoins énergétiques de l’humanité en 2050, nous avons besoin de l’énergie solaire », déclare l’intéressé. « Or les plantes savent mieux faire cette conversion d’énergie lumineuse en énergie chimique que nous en laboratoireen particulier les premières étapes qui sont extrêmement rapides. »

 

Du quantique au chimique

Des premières étapes quantiques à l’adaptation des plantes, l’étude de la photosynthèse requiert un spectre large d’expertises (biochimie, botanique, biophysique, biologie moléculaire physiologie des plantes…), toutes représentées au sein de l’équipe de Bruno Robert. Très internationale, celle-ci s’appuie sur des méthodes de recherche et des instruments « peaufinés au fil du temps » et uniques au monde. « Notre spécificité demeure la collecte de la lumière jusqu’au premier évènement chimique. Nous sommes les seuls à appliquer des méthodes de spectroscopie vibrationnelle à la photosynthèse. Elles nous permettent de décrire le système de manière très détaillée. »

 

Piéger et collecter l’énergie lumineuse

Il y a une quinzaine d’années, Bruno Robert découvre comment la plante parvient à réguler son mécanisme de conversion de la lumière en énergie, même si elle est exposée aux variations naturelles (soleil, ombre, vent). « Nous savions depuis les années 80 que ce phénomène était extrêmement régulé, mais nous ne comprenions pas comment, au niveau chimique, nous aboutissions à la même quantité d’énergie lumineuse. » Le chercheur identifie les molécules impliquées et propose un modèle appelé The molecular switch model, ou « le modèle du commutateur moléculaire ». « Les protéines dont le rôle est de collecter la lumière sont aussi capables de piéger l’énergie lumineuse pour la transformer en chaleur », explique le chercheur. « Or nous avons découvert que les ancêtres de ces protéines pouvaient uniquement piéger l’énergie lumineuse. Il est donc possible qu’ils aient évolué au fil du temps et acquis également la capacité de collecter efficacement la lumière. Désormais, à la manière d’un bouton électrique, ces protéines piègent ou collectent la lumière en changeant de conformation. »

 

Exploiter le désordre intrinsèque de la matière vivante

« Nous cherchons à prouver actuellement le caractère quantique de la photosynthèse », confie Bruno Robert. « La matière vivante est un système complexe et désordonné. Ce désordre dépend de la dynamique intrinsèque des molécules et de la vitesse avec laquelle les mécanismes biologiques ont lieu. Elle est pourtant capable de s’adapter à son environnement et d’atteindre un rendement quantique proche de 100 %. Elle réalise l’extraordinaire performance d’effectuer une réaction chimique avec chaque photon solaire capté, dans un milieu largement désordonné », explique le chercheur.

Très investi à l’international, au gré d’étroites collaborations avec des chercheurs du monde entier, Bruno Robert avoue « ne pas se lasser de trouver autant de créativité dans les nombreux laboratoires qu’il visite. »

 


Bruno Robert est responsable du Département biochimie, biophysique et biologie structurale de l’Institut de biologie intégrative de la cellule (I2BC – Université Paris-Saclay, CEA, CNRS, Université Paris-Sud). Il est également directeur du Laboratoire bioénergétique, métalloprotéines et stress (Institut Joliot du CEA). Il est auteur de 200 publications et aussi professeur extraordinaire à l’université libre d’Amsterdam. Il dirige aussi IBiSA, une infrastructure nationale multitutelle, placée sous la direction de cinq organismes de recherche (CEA, CNRS, Inra, Inria, Inserm), ainsi que de la Conférence des présidents d’université (CPU) et du ministère de l'Enseignement supérieur, de la Recherche et de l'Innovation. IBiSA soutient l’innovation des plateformes en agronomie, biologie et santé en France en finançant des technologies originales et innovantes des laboratoires, qui les mettent à la disposition de la communauté scientifique.