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Yvan Martel : le parcours brillant d’un spécialiste de l’analyse non linéaire

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 09 juin 2023 , mis à jour le 16 janvier 2024

Passionné par les équations aux dérivées partielles dispersives, Yvan Martel est professeur des universités, enseignant-chercheur au Laboratoire de mathématiques de Versailles (LMV – Univ. Paris-Saclay, UVSQ, CNRS), et directeur-adjoint formation de la Graduate School Mathématiques de l’Université Paris-Saclay.

Yvan Martel se passionne pour les mathématiques et la physique dès le collège. Après un baccalauréat scientifique en 1987, il intègre une classe préparatoire aux grandes écoles et rejoint en 1989 l’École polytechnique. En 1992, il effectue un DEA en analyse numérique à l’université Paris VI (aujourd’hui Sorbonne Université). « Je pensais être destiné à une carrière d’ingénieur, mais les professeurs m’ont convaincu de me tourner vers la recherche en mathématiques appliquées. » Il réalise ainsi une thèse qu’il soutient en 1996. Elle porte sur des équations non linéaires modélisant des phénomènes physiques variés tels que la chaleur.

 

L’étude théorique des équations aux dérivées partielles non linéaires

Le domaine de recherche d’Yvan Martel porte sur l’étude théorique des équations aux dérivées partielles non linéaires. Dans ce type de relations, l’inconnue est une fonction de plusieurs variables qui peut décrire, par exemple, la température dans un espace clos en tout point et en tout temps. « En mathématiques, il n’est souvent pas possible de calculer de manière explicite ces fonctions, mais on peut chercher à décrire leurs propriétés qualitatives. »

 

L’étude des phénomènes d’explosion

Grâce à une bourse attribuée par le ministère des Affaires étrangères, Yvan Martel poursuit ses travaux durant un an au Courant institute of mathematical sciences à New York. Il y fait la rencontre d’un mathématicien qui lui propose de le rejoindre à l'Université de Cergy-Pontoise (aujourd’hui CY Cergy Paris Université). Il est ainsi recruté au laboratoire Analyse, géométrie et modélisation en 1997, en tant que maître de conférences. En 2000, il obtient son habilitation à diriger des recherches. « Cette période fut très profitable dans ma carrière car la recherche y était grandement valorisée. » L’enseignant-chercheur travaille sur une variante de l’équation de Korteweg-de Vries, issue de la physique des ondes, et cherche à déterminer s’il existe des solutions de cette équation qui sont non bornées, c’est-à-dire qui deviennent plus grandes que toute constante en un certain temps. Débutant une longue collaboration sur ce sujet, il propose en 2000 certaines réponses partielles qui démontrent qu’il en existe. Puis, dans les années 2010, avec une équipe élargie, il décrit un ensemble plus grand de telles solutions et trouve un continuum de valeurs de vitesses à laquelle elles explosent. « Je travaille encore actuellement sur cette problématique, pour identifier toutes les vitesses possibles, et j’ambitionne de rédiger un livre sur le sujet. »

 

Un virage scientifique : l’étude des collisions de solitons

De 2002 à 2004, Yvan Martel retrouve l’École polytechnique et intègre le Centre de mathématiques théoriques, renommé Centre de mathématiques Laurent Schwartz (CMLS) en 2004. « Mes travaux se situent à la frontière entre les mathématiques appliquées et théoriques. Quand j’étudie la solution d’une équation, c’est dans le cadre de l’analyse mathématique, mais je la visualise avant tout comme une onde dans l’espace physique. »

Dans ce cadre, Yvan Martel étend son domaine de recherche pour s’intéresser au sujet de la stabilité des ondes solitaires, dites solitons. Celles-ci modélisent la position d’une particule dans le temps et l’espace. L’enseignant-chercheur souhaite comprendre leur niveau de perturbation lié au phénomène de collision. « J’étudie l’interaction d’ondes solitaires multiples, notamment lorsqu’elles entrent en collision. C’est un phénomène difficile à décrire car, dans le monde du non linéaire, l’addition de deux solutions ne donne pas une solution. »

En 2003, il part quatre mois à l’Institute of advanced studies, Princeton, New Jersey. Il s’y forge de nombreuses relations scientifiques et publie un article sur les multisolitons dans la revue American journal of mathematics.

 

La direction du laboratoire de mathématiques de Versailles

En 2004, Yvan Martel est recruté en tant que professeur à l’Université de Versailles - Saint-Quentin-en-Yvelines (université membre-associé de l’Université Paris-Saclay). De 2008 à 2012, il prend la direction du Laboratoire de mathématiques de Versailles (LMV – Univ. Paris-Saclay, UVSQ, CNRS). Il y mène plusieurs recrutements, notamment de personnel administratif, afin de donner aux scientifiques la possibilité de se consacrer pleinement à leurs travaux. « Ce fut une expérience humaine enrichissante, car je suis sorti de ma zone de confort pour accompagner mes collègues dans leurs objectifs et transitions de carrière. »

Grâce à des résultats de recherche notoires, Yvan Martel est nommé à l'Institut universitaire de France en 2008, ce qui lui offre une réduction de service d’enseignement pendant cinq ans. Par ailleurs, en 2011, afin de créer des synergies et de nouvelles opportunités de recherche, il noue un partenariat avec la Fondation mathématiques Jacques Hadamard (FMJH), qui fait de l’UVSQ son premier membre associé. Depuis, il participe très régulièrement à ses comités de pilotage.

 

La direction du CMLS

En 2012, Yvan Martel retourne à l’École polytechnique où il prend la direction du CMLS, qu’il conserve jusqu’en 2016. Il y conduit aussi des recrutements et apprécie la richesse des travaux qui s’y déroulent. « En 2015, nous avons invité de nombreuses célébrités des mathématiques pour célébrer les cinquante ans du centre, ce fut une expérience mémorable ! » De 2012 à 2015, il est élu membre du Comité national de la recherche scientifique, en charge des recrutements et des promotions des chercheurs et chercheuses CNRS en mathématiques.

 

La fusion des phénomènes d’explosion et de collision de solitons

En 2015, Yvan Martel part quatre mois au Mathematical sciences research institute (aujourd’hui Simons Laufer mathematical sciences institute) à Berkeley, en Californie. Fusionnant ses deux sujets de recherche principaux, il explore, avec un collègue, dans quelle mesure la présence de plusieurs solitons change la forme de l’explosion.

À son retour en 2016, Yvan Martel poursuit ses travaux et encadre des étudiantes et étudiants en thèse. Il est l’auteur de plusieurs articles dont certains sont l’aboutissement de longues périodes de réflexion, comme celui, en collaboration avec des chercheurs de Santiago du Chili, portant sur la résolution partielle d’une conjecture sur la stabilité asymptotique du kink, onde progressive d’un modèle connu en physique sous le nom de phi-4.

 

La Graduate School Mathématiques de l'Université Paris-Saclay

Yvan Martel retrouve l’Université Paris-Saclay en 2022, où il prend la direction-ajointe à la formation de la Graduate School Mathématiques de l’Université. Il a pour mission de coordonner les formations proposées sur les différents sites de l’Université, afin de garantir leur cohérence et de stimuler les échanges entre les mathématiciennes et mathématiciens et les non spécialistes. Yvan Martel a aussi à cœur de faciliter la compréhension des divers mécanismes à la disposition des étudiantes et étudiants et des enseignants-chercheurs et enseignantes-chercheuses, afin de leur faire bénéficier du meilleur environnement de travail possible. « J’admire le dynamisme et la passion avec lesquels les jeunes talents se lancent aujourd’hui dans leurs travaux, et je souhaite les aider à se retrouver facilement dans l’écosystème de l’Université pour encourager cette ardeur. »

 

Yvan Martel