VivAgriLab : faire dialoguer agriculture et recherche dans le sud-ouest francilien

Développement soutenable Article publié le 17 avril 2025 , mis à jour le 17 avril 2025

Cet article est issu de L'Édition n°26.

Créé en 2021, le VivAgriLab est une initiative destinée à faire dialoguer la recherche, l’agriculture et les acteurs et actrices locaux des territoires du sud-ouest francilien, dans laquelle l’Université Paris-Saclay est partie prenante. Le but est d’élaborer des projets de recherche appliquée sur les questions de transition agricole, écologique et alimentaire.

« Relier ville et vivant », tel est l’objectif de l’initiative qui voit le jour en 2021 dans le sud-ouest francilien. Nommé VivAgriLab, le projet s’étend du plateau de l’Hurepoix à la plaine de Versailles, en passant par le plateau de Saclay. Ce vaste territoire, comprenant 79 communes, a la particularité de rassembler quelque vingt mille hectares de surface agricole mais aussi 25 % de la recherche agronomique française. Et si ces deux mondes travaillaient ensemble pour faire face aux enjeux actuels en matière de changement climatique, de biodiversité, d’écologie ou encore de transition alimentaire ? C’est de cette volonté commune que naît le VivAgriLab.

« Sur le plateau de Saclay, il y avait auparavant peu d’interactions entre la recherche, les agriculteurs, les collectivités et les acteurs locaux », explique Paul Leadley, professeur d’écologie, enseignant-chercheur au laboratoire Écologie, systématique, évolution (ESE – Univ. Paris-Saclay/CNRS/AgroParisTech) et coordinateur de l’objet interdisciplinaire C-BASC (Centre d’études interdisciplinaires sur la biodiversité, l’agroécologie, la société et le climat) de l’Université Paris-Saclay. C-BASC co-anime le VivAgriLab avec l’association Terre & Cité, qui œuvre depuis 2001 pour la préservation et la promotion des patrimoines agricoles, naturels et historiques du plateau de Saclay. « En 2013, avec Terre & Cité, nous avons eu l’idée d’organiser une première réunion entre des agriculteurs, agricultrices et des chercheurs et chercheuses pour bâtir ensemble des projets de recherche », se souvient Paul Leadley. Les bases d’un living lab, offrant un espace de dialogue entre agriculture et recherche, sont alors posées. 

Trois ans plus tard, en 2016, l’expérience se renouvelle avec des rencontres à plus grande échelle : les ateliers de Saclay.  « Ces ateliers ont été fondamentaux dans l’émergence du VivAgriLab », explique Sophie Pradié, coordinatrice à Terre & Cité. « Plus d’une cinquantaine d’acteurs et actrices du territoire étaient présents pour travailler autour de l’écologie territoriale. » Et faire naître de premiers projets d’étude. « Elles et ils ont notamment travaillé sur la notion de métabolisme territorial. L’objectif était d’analyser les flux entrants et sortants de carbone, d’azote, de phosphore et d’eau sur le plateau de Saclay. » Les ateliers mettent en évidence la nécessité de travailler le bouclage des flux sur le territoire mais aussi de s’organiser collectivement pour y parvenir.

Un premier projet pour améliorer la durabilité du territoire

C’est finalement en 2021 que le VivAgriLab prend forme, en étendant son territoire au-delà du plateau de Saclay grâce à onze partenaires, dont l’Université Paris-Saclay, les associations des territoires agri-urbains du Triangle Vert et de la Plaine de Versailles, la Chambre d’agriculture de la région Île-de-France ou encore l’Établissement public d’aménagement (EPA) Paris-Saclay. Ainsi structurée, l’initiative réussit une première levée de fonds pour soutenir le projet, Flux Local, destiné à améliorer la durabilité du territoire, en favorisant la production et la consommation d’aliments locaux ainsi que l’utilisation des déchets organiques produits localement pour enrichir les sols. 

À ce jour, ce living lab, dont la convention de partenariat est signée en 2024, totalise près d’une trentaine de projets de recherche appliquée explorant différents sujets, tels que la valorisation des urines en engrais agricole. Les urines humaines contiennent en effet une grande quantité d’azote qui est un élément indispensable à la croissance des plantes. Depuis 2021, des travaux s’attachent ainsi à étudier comment récupérer ces déchets, les utiliser en tant qu’engrais et déterminer les effets sur la production agricole. Grâce à la collaboration avec des agriculteurs et agricultrices, des essais sont menés sur des parcelles expérimentales de blé et de maïs au sein de deux fermes, aboutissant à des « rendements équivalents à ceux obtenus avec des engrais de synthèse », assure Sophie Pradié. 

Parallèlement, l’EPA Paris-Saclay planche sur des aménagements pour collecter les urines. À terme, c’est toute une filière de valorisation des urines qui verrait le jour à partir de ces études. « L’un des objectifs de l’EPA Paris-Saclay est que l’ensemble du quartier de Corbeville [sur le plateau de Saclay] soit équipé de structures pour collecter à la source les urines », précise la coordinatrice. Ceci servirait à récupérer jusqu’à 10 000 m3 d’urine par an. 

Une journée annuelle placée sous le thème de l’eau

Le 16 janvier 2025, le VivAgriLab organise sa journée annuelle placée, cette année, sous le thème de l’eau. « Avec la pluviométrie très conséquente de 2024 et les inondations survenues en octobre, il y avait une forte demande pour travailler sur le sujet de l’évolution de la ressource en eau en agriculture face au changement climatique », détaille Sophie Pradié. Qu’il s’agisse de sécheresse ou d’excès d’eau, quelles réflexions et quelles actions mettre en place à l’échelle territoriale ? Pour y répondre, plus de 150 personnes assistent à l’événement et une trentaine d’intervenantes et intervenants dont des agriculteurs tels que Nicolas Revol, de la ferme de Gisy installée à Bièvres. 

« Cette année, nous avons reçu plus de mille millimètres de pluie contre environ cinq cents d’habitude. Beaucoup de nos parcelles ont été inondées et nous avons perdu 30 % de nos légumes », témoigne le maraîcher lors d’une première table-ronde. Des acteurs territoriaux sont aussi présents pour faire part de leur retour sur cette année particulière, dont le Syndicat intercommunal pour l’assainissement de la vallée de la Bièvre (SIAVB). Une autre table-ronde donne par la suite la parole à des chercheurs et chercheuses venus présenter leurs travaux en lien avec l’adaptation des écosystèmes face à l’évolution de la ressource en eau en agriculture. 

Enfin, l’après-midi donne lieu à huit ateliers de co-construction sur différentes thématiques, de la diversification des cultures au déploiement d’un projet de plantation de haies en passant par le recyclage de la matière organique dans les sols. « Cette journée est très représentative de la manière dont fonctionne le VivAgriLab. Avec ce principe de co-construction, nous voulons amorcer les discussions. Le but de nos rencontres n’est pas de résoudre le problème instantanément mais de voir qui peut faire quoi et comment, par la suite, on peut travailler ensemble sur ces questions », conclut Paul Leadley.

 

 

 

Cet article est issu de L'Édition n°26.
L'intégralité du journal est à découvrir ici en version numérique.
Pour découvrir d'autres articles et sujets, abonnez-vous au journal L'Édition et recevez les prochains numéros : 

S'abonner