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Valérie Camel : les méthodes analytiques au service de la sécurité sanitaire

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 28 mai 2021 , mis à jour le 04 juin 2021

Valérie Camel est professeure en chimie analytique et sécurité sanitaire à AgroParisTech et chercheuse au sein du laboratoire SayFood (Food & Bioproduct Engineering / Université Paris-Saclay, INRAE, AgroParisTech). Spécialiste des méthodes d’analyses ciblées et non ciblées des contaminants chimiques et experte auprès de l’Anses depuis plus de 15 ans, elle est également très engagée au service de l’innovation pédagogique et de ses étudiants et étudiantes. 

C’est de manière assez classique au sein d’une classe préparatoire physique-chimie du lycée Pierre de Fermat de Toulouse que débute le parcours de Valérie Camel. « Fille de parents instituteurs, je me voyais alors intégrer l’École normale supérieure pour devenir enseignante. » Admissible à l’ENS de Lyon, elle intègrera finalement l’ESPCI en 1987. Convaincue par le modèle alors proposé d’un enseignement par la recherche, elle décide en sortie d’école de poursuivre son cursus en thèse au sein de l’Université Pierre et Marie Curie. Elle y obtient son doctorat en 1994 et son HDR (habilitation à diriger des recherches) en 2002. Toujours animée par l’envie d’enseigner, elle passe en 1996 le concours de maître de conférences à l’INA P-G, puis en 2009 celui de professeur dans ce même établissement, devenu entre-temps AgroParisTech. Elle y enseigne encore actuellement, en parallèle de son activité de recherche au sein de l’équipe Génie des produits (GéPro) du laboratoire SayFood.

 

L’analyse de traces de contaminants chimiques 

C’est au développement de méthodes rapides d’extraction de polluants contenus dans des sols que Valérie Camel consacre sa thèse de doctorat, et ce avec une orientation guerre chimique ! « Je travaillais dans un centre d’étude du ministère de la Défense s’intéressant aux armes chimiques et biologiques. L’objectif, dans le cadre de ma thèse, était de parvenir à développer des méthodes d’analyse rapides pour savoir par exemple si un champ était contaminé pas des agents chimiques avant d’y envoyer des troupes », explique la chercheuse. L’occasion pour la jeune chimiste de se spécialiser dans le développement de méthodes analytiques pour la détermination de traces. Des développements auxquels elle consacrera la suite de sa carrière de recherche - récompensée en 1999 par le prix de la Division Chimie analytique de la Société française de chimie - avec différents domaines d’application. 

 

De l’environnement aux matrices agro-alimentaires

Premier domaine d’application : l’environnement. « J’ai consacré les dix premières années de ma carrière aux problématiques environnementales, tout d’abord le traitement des eaux avant de m’intéresser à la question de la remédiation des sols. J’ai notamment travaillé sur les procédés d’oxydation avancée à base d’ozone, un gaz que l’on peut produire en laboratoire, et à base aussi de réactifs chimiques, comme le réactif de Fenton », précise Valérie Camel. C’est au tournant des années 2005, alors que la question des contaminants chimiques dans les aliments commence à émerger, que Valérie Camel oriente ses recherches vers la problématique alimentaire à laquelle elle se consacre aujourd’hui encore au sein de SayFood. « Mon objectif est de développer et valider des méthodes analytiques capables de mettre en évidence et suivre les contaminants chimiques, en particulier des composés néoformés toxiques (comme l’acrylamide) issus de réactions chimiques indésirables se produisant lors de la fabrication de certains aliments. Nous travaillons également de plus en plus au développement d’approches non ciblées », explique la chercheuse. 

 

Une expertise en chimie analytique mise au service de l’Anses

En parallèle, Valérie Camel démarre, dès 2006, des travaux d’expertise, toujours en lien avec ses travaux de recherche, au sein de différents Comités d’Experts Spécialisés (CES) de l’Anses portant notamment sur l’évaluation des risques liés aux produits biocides ou aux contaminants dans les aliments. Elle rejoindra ensuite, toujours au sein de l’Anses, pas moins de six Groupes de travail (GT) entre 2012 et aujourd’hui. « Cette expérience à l’Anses m’a énormément appris en toxicologie, écotoxicologie et évaluation des risques. Autant de compétences et une approche intégrative qui ont nourri mes activités pédagogiques et m’ont amenée, lors de la création d’AgroParisTech, à faire des propositions sur les contenus à enseigner à nos étudiants. Avec quelques collègues, nous avons notamment défendu la création, en plus des trois domaines d’enseignement historiques de l’école (l’environnement, la forêt et l’agro-alimentaire), d’un domaine consacré à la Santé Humaine qui draine aujourd’hui près d’une centaine d’étudiants par an. »  

 

La volonté de contribuer aux collectifs

Reconnue pour son expertise sur les questions de sécurité sanitaire, que ce soit côté recherche ou côté enseignement, Valérie Camel ne s’est jamais contentée d’en rester là. Elle a toujours eu à cœur de « contribuer au collectif », comme elle aime l’expliquer. Au sein d’AgroParisTech, elle monte par exemple en 2007 une cellule de prévention et de veille auprès des étudiants en difficulté avec l’aide de la Direction des études et de la vie étudiante de l’établissement, avec pour objectif de les accompagner et éventuellement de les orienter vers des personnes spécialisées. « En parallèle de ce dispositif dont je suis très fière, nous avons également constitué un pool d’enseignants référents acceptant de suivre chaque année un groupe d’étudiants et d’être pour eux un relais en cas de problème », ajoute-t-elle. 

Si elle s’implique auprès de ses étudiants, elle n’hésite pas non plus à travailler main dans la main avec ses collègues d’autres disciplines dans le cadre de projets de valorisation. Elle fait notamment partie de l’équipe pluridisciplinaire d’enseignants-chercheurs de l’Université Paris-Saclay à l’origine de CHIMACTIV, un site de ressources pédagogiques numériques dans le domaine de l’analyse chimique de milieux complexes plusieurs fois récompensé pour la qualité de ses contenus. « Dans l’aventure CHIMACTIV, je retrouve vraiment la culture interdisciplinaire qui m’enthousiasme tant, en ce qu’elle nous pousse tous à sortir de nos zones de confort, à nous questionner, pour créer un langage commun et avancer ensemble. » 

 

L’innovation pédagogique comme cheval de bataille

Avancer ensemble, c’est aussi le leitmotiv qui la pousse depuis toujours à s’impliquer dans l’innovation pédagogique. « J’ai commencé à m‘intéresser à ces questions de pratiques pédagogiques dès 2002 après avoir suivi un cycle de formation proposé par le ministère de l’Agriculture », explique Valérie Camel. Continuant à se former grâce aux ateliers proposés dans le réseau ParisTech, elle s’implique dès 2012 dans la conception de sessions de formation en pédagogie à destination d’enseignants du supérieur. Elle contribue depuis 2018 à l’animation du séminaire de pédagogie mis en place par l’Université Paris-Saclay pour accueillir ses maîtres de conférences nouvellement recrutés. « En 2020, l’Université Paris-Saclay m’a missionnée pour susciter et développer, auprès de ses enseignants et enseignantes qui le souhaitent, l’approche SoTL (Scholarship of Teaching and Learning) dont l’objectif est de transposer la méthodologie du chercheur à son activité d’enseignement, c’est-à-dire adopter une posture réflexive documentée par rapport à sa pratique et la valoriser », ajoute-t-elle. Une mission qui la passionne et à laquelle elle consacre désormais presque un quart de son temps.