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Une imprimante 3D dans la cuisine

Recherche Article publié le 22 octobre 2021 , mis à jour le 22 octobre 2021

Depuis sa popularisation dans les années 2000, l'impression 3D est couramment utilisée dans les secteurs de l'industrie automobile, des prothèses médicales ou encore pour la fabrication de figurines en plastique. Et pourquoi ne pas s'en servir pour élaborer la nourriture de demain, comme l’envisage l’équipe Génie des produits (GéPro) du laboratoire SayFood (Univ. Paris-Saclay, INRAE, AgroParisTech) ?

Les apprentis pâtissiers ont de quoi se réjouir : bientôt, ils n’auront peut-être plus besoin de poche à douille pour fabriquer leurs gâteaux, une imprimante le fera à leur place ! Au laboratoire SayFood (Univ. Paris-Saclay, INRAE, AgroParisTech), l'équipe de Camille Michon et de Giana Almeida teste les aliments compatibles avec une telle approche. Ces recherches, menées dans le cadre du projet ID3AL, s’intéressent au potentiel de l’impression 3D pour la création de plats innovants. Le principe d’impression développé s’inspire de l'impression 3D classique : une préparation suffisamment malléable est poussée à travers une ouverture étroite et la longue bande qui en sort s’empile en couches successives pour former un objet en trois dimensions. À partir d'un modèle numérique, il devient possible de créer des plats aux formes originales et de les reproduire facilement.

 

À la recherche de la texture idéale

Tout repose sur la consistance de la pâte. Alors que d’autres chercheurs se sont intéressés à la purée de pomme de terre et à la pâte de surimi, Laurena Masbernat, Giana Almeida et leurs collègues ont choisi d'explorer le potentiel d'une pâte toute simple, élaborée uniquement avec quatre ingrédients : de la farine de blé, de l'eau, du sucre et de l'huile. En modifiant les proportions de chacun, l’équipe de chercheurs et de chercheuses obtient des pâtes aux textures très diverses.

Mais comme ces préparations sont initialement liquides, il faut les malaxer et les cuire pendant quinze minutes à plus de 85°C avant de les introduire dans l'imprimante. Lors de cette cuisson, la viscosité de la pâte augmente jusqu'à atteindre une valeur proche de celle nécessaire à l'impression 3D des thermoplastiques. Et pour cause : la pâte qui passe à travers l'imprimante doit être assez résistante pour que les couches du dessous ne s'effondrent pas sous le poids de celles au-dessus.

 

Exploiter le potentiel de la farine de blé

Pour contrôler la viscosité de la pâte, il faut jouer sur les proportions d'eau et de farine. C’est là toute la particularité des préparations utilisées par l’équipe du SayFood : elles sont très riches en eau, plus de la moitié de la masse. La farine de blé ainsi hydratée, les granules d’amidon qu’elle contient absorbent l'eau lors de la cuisson et changent de structure. Ils gonflent et s’enchevêtrent dans une matrice de protéines, ce qui augmente la viscosité de la pâte pendant la cuisson. On obtient en fin de traitement une texture de pâte très intéressante pour l'impression 3D.

Mais le sucre et l'huile ont également leur mot à dire : le rajout de sucre, par exemple, retarde le gonflement des granules d’amidon lors de la cuisson. Les quantités sont donc à déterminer avec précision. Les chercheurs ont ainsi réussi à imprimer une diversité d’objets fidèles aux modèles dessinés sur ordinateur grâce à des pâtes contenant 65 % d'eau pour 15,5 % de farine, 12 % de sucre et 7,5 % d'huile de tournesol. 

Exemples d'objets imprimés en 3D d'après modèles. Crédit photo : Adapté de Masbernat et al., 2021. https://doi.org/10.1016/j.jfoodeng.2021.110696

Même si l'impression 3D en cuisine n'en est qu'à ses débuts, ces travaux laissent entrevoir de nombreuses possibilités. Pour autant, il n’est dans l’immédiat pas question de remplacer cuisiniers et casseroles par une batterie d'imprimantes. Mais de nombreuses initiatives sont en train d'émerger : personnaliser des aliments lors d’une occasion spéciale, recréer des hamburgers ou des pizzas, ou encore inventer de nouvelles géométries pour des plats aux aspects et textures uniques. Il y en a pour tous les goûts !

 

Référence :