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SPARK : réduire les émissions de CO2 et décentraliser la production d’hydrogène

Innovation Article publié le 09 juin 2021 , mis à jour le 09 juin 2021

La future start-up SPARK développe une technologie innovante pour réduire les émissions de CO2 issues de la production conventionnelle d’hydrogène. Son procédé unique devrait intéresser les entreprises qui souhaitent limiter leur empreinte carbone et leurs coûts de production, et les futurs opérateurs de stations-services hydrogène, tant en France qu’à l’international. 

Le projet SPARK - du nom du régime de plasma nanosecondes qu’il utilise - est issu des travaux de thèse d’Erwan Pannier, docteur du laboratoire d'Énergétique moléculaire et macroscopique, combustion (EM2C - Université Paris-Saclay, CentraleSupélec, CNRS). Il la soutient en 2019 à la suite de ses études à Centrale Paris où il suit un cursus spécialisé en énergie. L’objectif de SPARK est de proposer une solution pour transformer les gaz à effet de serre en hydrogène, un projet inscrit dans la transition écologique. Car aujourd’hui, en France, de nombreux industriels utilisent l’hydrogène comme intrant dans leurs procédés, pour ses propriétés moléculaires. Mais, dans 95 % des cas, il est produit à partir de gaz fossiles selon des procédés fortement émetteurs de gaz à effet de serre, et sa génération est responsable de 3 % des émissions aux niveaux national et mondial. Le jeune chercheur s’intéresse aux méthodes pour décarboner la production d’hydrogène. De plus en plus utilisée, la production par électrolyse consomme aussi beaucoup d’électricité. « Si on utilisait l’électrolyse pour fournir tout le volume d’hydrogène nécessaire en 2030, il faudrait environ sept tranches de centrales nucléaires supplémentaires pour l’alimenter, rien qu’en France. » 

 

Décarboner et décentraliser l’hydrogène

La mission de SPARK est de concevoir une solution intermédiaire décarbonée et efficiente. Elle consiste à opérer la pyrolyse du méthane par plasma froid pour en extraire l’hydrogène sans rejeter de gaz à effet de serre. Il s’agit d’utiliser des impulsions électriques très courtes afin de casser les molécules de méthane et d’en retirer le carbone sous forme solide. Il n’y a ainsi pas d’émissions de CO2. Cette solution est aussi peu gourmande en électricité : « grâce au procédé de pyrolyse par plasmas froids, nous consommons trois à cinq fois moins d’énergie qu’un électrolyseur qui extrait de l’hydrogène de l’eau ». Par ailleurs, s’il existe d’autres technologies pour produire de l’hydrogène décarboné par pyrolyse, certaines utilisent des plasmas à plus haute température, ce qui cause des contraintes thermiques sur l’efficience du procédé et les matériaux du réacteur. « Avec les plasmas froids, ces arcs électriques dont on contrôle la température, nous levons toutes ces difficultés. » 

 

Un nouveau modèle de distribution

SPARK ambitionne de rendre possible la production d’hydrogène pour des volumes et débits moyens, de l’ordre de 200 à 2 000 kg/jour, directement sur les lieux de consommation. Cette production décentralisée disrupte le modèle de distribution de l’hydrogène marchand traditionnel, qui produit de manière massive et centralisée, puis livre par la route aux petits et moyens consommateurs. Or, l’hydrogène est une molécule qui se transporte plutôt difficilement - du fait de sa petite taille et de sa très faible densité volumique notamment – et ce mode de distribution représente des coûts importants qui s’élèvent au moins à 70 % du prix final. Grâce à une production sur place et à la demande, SPARK offre la possibilité de s’affranchir de cette contrainte et de son coût environnemental. Cette dimension novatrice est d’autant plus importante que les usages de l’hydrogène en tant que vecteur énergétique promettent d’être davantage décentralisés à l’avenir.

 

De nombreux soutiens et accompagnements

Cette innovation voit le jour grâce aux nombreux dispositifs d’accompagnement de l’Université Paris-Saclay. En 2019, Erwan Pannier participe au parcours « Les Doctor’preneuriales », qui forme les doctorants et les doctorantes à l’entrepreneuriat spécifique à la deeptech, c’est-à-dire des projets directement issus de laboratoires. « Les mondes de la recherche et de l’entrepreneuriat ont des points communs, mais il faut s’immerger dans les deux pour parvenir à les relier. » Le jeune docteur s’initie à l’entrepreneuriat via des ateliers de type « hackathon » et découvre à cette occasion tout l’écosystème entrepreneurial de l’Université. Lorsque son projet est mûr, il se tourne vers la SATT Paris-Saclay qui lui octroie un accompagnement et un soutien financier dans le cadre du projet de prématuration « Jeune docteur ».

Le jeune chercheur réalise alors une preuve de concept technique de son projet, et dépose un brevet sur les moyens de stabiliser les décharges nanosecondes pulsées du plasma, afin de rendre possible leur application industrielle. « Sans ces dispositifs d’accompagnement, SPARK ne serait aujourd’hui qu’un manuscrit de thèse sur une étagère. » Début 2020, il est lauréat du concours d’innovation i-PhD de Bpifrance, réservé à des jeunes docteurs qui souhaitent créer une start-up deeptech. Il suit ainsi leur programme d’accompagnement DeepTech Founders, au cours duquel il rencontre la jeune entrepreneuse et diplômée d’HEC Thérèse Dettwiller. Elle rejoint le projet SPARK pour accélérer son développement et prendre la tête de la future start-up. Comme Erwan Pannier, son ambition est de développer une technologie « à impact », à vocation environnementale. À la fin de l’année 2020, le projet bénéficie de fonds issus de l’appel à projets Maturation de la SATT Paris-Saclay. Ce qui permet de recruter un ingénieur expert de la conception de réacteurs et de générateurs de plasma, afin d’accélérer le développement de l’innovation.

 

De grandes ambitions

La prochaine étape sur la feuille de route de SPARK est d’optimiser le réacteur, le cœur de la technologie, pour la pyrolyse de méthane d’ici à juillet 2022. Par la suite, la start-up prévoit de développer un premier démonstrateur industriel, c’est-à-dire un assemblage d’unités modulaires dans un container, capable de produire entre 25 et 100 normo mètre cube par heure (Nm3/h) d’hydrogène aux normes industrielles, sur site. Dans ce but, elle cherche à se rapprocher d’industriels pour co-développer le projet, bénéficier d’une expertise en matière de procédés, et héberger le démonstrateur afin de le tester en conditions réelles. SPARK envisage dans un premier temps de déployer la solution pour des usages industriels avant de répondre aux besoins de mobilité. « Imaginez un maillage des territoires avec un réseau de stations-services hydrogène pour les poids lourds et les flottes captives, mais aussi pour les gares et les autres terminaux de transports ! » La création de la start-up est prévue pour le milieu de l’année 2021. « Aujourd’hui, tous les industriels sont à l’affût de technologies émergentes pour la production d’hydrogène, alors nos ambitions dépassent largement le territoire français. Nous avons déjà élargi nos dépôts de brevets pour couvrir le marché à une échelle internationale. »