Aller au contenu principal

SARS2BlockEntry : Empêcher l’entrée du virus dans les cellules grâce à des protéines

Recherche Article publié le 14 mai 2020 , mis à jour le 25 mai 2020

Suite à l’appel Flash Covid-19 de l’Agence nationale de la recherche (ANR), de nombreux projets ont vu le jour dans le but d’étudier et de lutter contre la pandémie de Covid-19. Le projet SARS2BlockEntry, porté par Bernard DELMAS du laboratoire Virologie et immunologie moléculaires (VIM - Université Paris-Saclay, UVSQ, INRAE), fait partie des projets sélectionnés.

L’objectif du projet est de construire des « nano-ligands » capables d'inhiber ou de bloquer l’entrée du SARS-CoV-2 dans les cellules cibles. Ce travail devrait aboutir à la mise au point de médicaments antiviraux ciblant le Covid-19.

Des protéines pour bloquer les récepteurs du virus

Le laboratoire de Virologie et d’immunologie moléculaires est spécialisé dans l’étude de pathogènes d’intérêt pour la santé animale et la santé humaine. Plusieurs équipes, dont celle de Bernard Delmas, y travaillent sur des virus qui s’attaquent aux voies respiratoires : les virus influenza, responsables de la grippe, ainsi que le virus respiratoire syncytial (VRS), qui cause la bronchiolite. « Ce nouveau virus, le SARS-CoV-2, est à tropisme respiratoire. Et comme nous avions déjà travaillé sur d'autres coronavirus d'intérêts vétérinaires et l’entrée de ces virus dans leurs cellules cibles, on s'est donc dit qu'on pouvait faire quelque chose », explique Bernard Delmas, le porteur du projet SARSBlockEntry.

Ce projet se base sur l’élaboration de deux types de ligands : des anticorps de camélidés, appelés VHH, et des protéines artificielles, nommées alphaRep. Son but est de sélectionner des nano-ligands, capables de reconnaître un domaine particulier d’une protéine du virus, le receptor binding domain (RBD) du spicule, et de le bloquer. Les spicules sont des protéines de l’enveloppe. Ce sont elles qui confèrent au coronavirus son aspect en couronne, d’où il tire son nom. Ce domaine particulier des spicules permet au virus de se fixer sur des cellules hôtes spécifiques : en interagissant avec un récepteur situé à la surface des cellules-cibles, l’angiotensin converting enzyme 2 (ACE2), le domaine joue un rôle crucial dans l’infection et l’entrée du virus dans les cellules-cibles.

Une collaboration entre laboratoires

L’idée des chercheurs est d’empêcher cette entrée grâce aux nano-ligands. Pour cela, ils procèderont à des expériences in vitro (en cultures de cellules) ainsi qu’in vivo (dans un modèle d'infection de souris).

L’équipe est déjà au travail. La première étape consiste à produire le RBD, de manière à ensuite l’utiliser pour sélectionner les nano-ligands qui lui sont spécifiques.

« Les criblages des VHH spécifiques seront réalisés dans le laboratoire Architecture et fonction des macromolécules biologiques (AFMB - Université Aix-Marseille, CNRS) par l’équipe d’Alain Roussel. Ceux pour les alphaRep seront confiés à l’équipe de Philippe Minard, de l’Institut de biologie intégrative de la cellule (I2BC - Université Paris-Saclay, CEA, CNRS). Les expériences in vivo seront menées à l’école vétérinaire de Maisons-Alfort par Sophie le Poder, professeure de virologie. Cette sélection devrait commencer d'ici un mois et on espère obtenir ces nano-ligands relativement vite », précise Bernard Delmas.

 

Le laboratoire et les coronavirus, une longue histoire

L’étude de spicule de coronavirus n’est pas une nouveauté pour Bernard Delmas. Dans le passé, le chercheur a travaillé plus de dix ans sur un coronavirus d’intérêt vétérinaire, le virus de la gastroentérite transmissible chez le porcelet (TGEV). L’équipe, alors dirigée par Hubert Laude, a caractérisé la structure antigénique du spicule et a cherché à comprendre comment celui-ci interagit avec son récepteur.

« C’est le passé de notre laboratoire sur la thématique du coronavirus qui nous a aidé à facilement nous lancer dans ce projet », conclut Bernard Delmas.