Aller au contenu principal

RETOUR SUR RENCONTRE - « Comment les scientifiques peuvent contribuer aux enjeux de société et aider le politique à la prise de décision ? »

Formation Article publié le 28 novembre 2023 , mis à jour le 28 novembre 2023

Mercredi 15 novembre 2023, les GS Health and Drug Sciences, Chimie et Life Sciences and Health ont organisé une rencontre autour de la problématique du rôle des scientifiques dans les enjeux de société. À destination des étudiant·e·s et doctorant·e·s, cette rencontre était animée par deux scientifiques présentant leur retour d’expérience quant à leur engagement.

Contribuer à la prise de décision politique par la thèse

Vice-présidente de l’Université Paris-Saclay en charge du développement soutenable, Sophie SZOPA est impliquée dans le Groupe d’Experts Intergouvernemental sur l’Évolution du Climat (GIEC). Pour rappel, les rapports du GIEC ont pour objectif de fournir un état des lieux scientifique sur l’ampleur du dérèglement climatique et de ses conséquences sur la biodiversité. Ces rapports servent de support aux négociations internationales sur le climat, tout en alertant les décideurs et la société civile.

Après un parcours académique composé d’une thèse théorique en chimie, Sophie SZOPA joue donc, aujourd’hui, un rôle d’expertise scientifique à destination des décideurs politiques. Elle a insisté sur le fait que les travaux de thèse servent à la décision et que les doctorants ne doivent pas être découragés par les exercices répétitifs et micro-locaux constitutifs du travail de thèse. Selon la Vice-Présidente « c’est l’agrégation de l’ensemble de ces exercices qui constituent la connaissance à la base des éléments nécessaires à la prise de décision ».

Prendre conscience des problèmes de communication entre scientifiques et profanes

Directeur de recherche dans le laboratoire Institut de Biologie Intégrative de la Cellule (I2BC – UMR 9198 - CNRS), Yves GAUDIN a davantage axé son intervention sur la relation complexe entre les médias et les scientifiques. En s’appuyant sur le contexte de la pandémie de la Covid-19, il s’est attelé à présenter divers biais cognitifs à l’origine des problèmes de communication entre les scientifiques d’un côté et les médias et la société civile de l’autre.

D’un côté, les scientifiques sont victimes d’un « biais de supériorité » puisque selon le chercheur, le manque de connaissance scientifique des médias les conduit parfois à poser des questions très éloignées du domaine d’expertise précis du scientifique. Il illustre cela par les nombreuses interviews auxquelles il a été sollicité lors de la crise de la Covid-19 où il a reçu de nombreuses questions sur la gestion de la crise plutôt que sur les aspects de virologie, son domaine d’expertise. Yves GAUDIN rappelle alors la nécessité pour le scientifique de se confiner à son niveau d’expertise et savoir affirmer « je ne sais pas ».

D’un autre côté, les médias et la société civile connaissent un « biais d’autorité ». D’après l’intervenant, ils sont prêts à se fier aux paroles de toute  personne présentant les signes ostentatoires de l’autorité médicale, comme le port de la blouse blanche.

S’engager au niveau individuel et collectif

Les retours d’expérience de Sophie SZOPA et Yves GAUDIN ont convergé sur la nécessité pour la communauté scientifique de s’engager individuellement et collectivement afin de contribuer aux enjeux de société.

A l’échelle individuelle, les deux intervenants ont insisté sur la nécessité de s’engager dans la médiation et la vulgarisation scientifique. Dans le cadre du conseil fait aux décideurs politiques, Sophie SZOPA rappelle la difficulté à communiquer un message simple, là où le chercheur est attaché à la complexité du réel qu’il étudie. Elle a progressivement appris à mesurer le bon niveau de simplification.

Au niveau collectif, ils soulignent la nécessité d’augmenter le niveau de culture scientifique dans les différentes sphères de la société et de revaloriser la formation par la recherche. Selon Yves GAUDIN, cette problématique est cruciale à l’heure des réseaux sociaux puisque les individus sont constamment confrontés aux mêmes informations, qui entretiennent leur croyance, potentiellement erronée, sur un domaine.

« J’ai autant l’impression de faire bouger la société par la formation que par la discussion avec les décideurs politiques »
Sophie SPOZA