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Diminuer les pertes dans les machines électriques

Recherche Article publié le 24 juillet 2020 , mis à jour le 28 juillet 2020

Des chercheurs du laboratoire Systèmes et applications des technologies de l’information et de l’énergie (SATIE - Université Paris-Saclay, ENS Paris-Saclay, CNRS, CNAM, Cergy Paris Université) ont mis au point, en collaboration avec l’Université de Sao Paulo, un procédé pour réduire les pertes de fer à haute fréquence dans les machines électriques. Cette méthode couplant traitement mécanique et thermique, a également donné lieu à une analyse du comportement fréquentiel des matériaux, de façon à comprendre les mécanismes qui en améliorent les performances.

 

Constituants essentiels des machines électriques, les matériaux magnétiques subissent un échauffement qui augmente avec la fréquence d’utilisation et qui entraine une baisse de performance de ces machines. Alors que celles-ci gagnent toujours plus en puissance et fonctionnent à des fréquences de plus en plus élevées, diminuer ces pertes est synonyme de rendements bien plus importants. Grâce à leurs bonnes connaissances des mécanismes impliqués, l’équipe du laboratoire SATIE et l’Institut de recherche technologique de l’Université de Sao Paulo ont développé un nouveau type de traitement des matériaux magnétiques, permettant de limiter ces pertes.

Les matériaux magnétiques au cœur de la recherche

Au sein du laboratoire SATIE — dont le domaine de compétence s’étend de l’énergie électrique au traitement du signal — l’équipe s’attache aussi bien à élaborer des matériaux magnétiques qu’à en étudier les propriétés physiques et fonctionnelles. Ces matériaux comportent des champs d'applications très variés, des transformateurs aux réfrigérateurs magnétiques.

« Les matériaux magnétiques classiquement utilisés dans les machines électriques voient aujourd’hui leur utilisation limitée par les fréquences de fonctionnement, qui augmentent continuellement », explique Frédéric Mazaleyrat. Il y a vingt ans, la plupart des moteurs électriques fonctionnaient à une fréquence de 50 Hertz. Mais à l’heure actuelle, les machines, en particulier les véhicules électriques, fonctionnent à des fréquences bien plus élevées pour assurer un gain de puissance par unité de volume et masse. Plus la vitesse de rotation d’un moteur électrique est élevée, plus sa puissance à volume constant devient grande. Mais dans le même temps, plus on augmente cette fréquence, plus les pertes dans le noyau magnétique s’accentuent. « Ces pertes excessives, directement liées aux fréquences de fonctionnement, bloquent souvent la conception de nouveaux moteurs », remarque Frédéric Mazaleyrat.

Des traitements mécaniques et thermiques pour limiter les pertes

Les solutions existent pourtant. Comme les pertes dépendent de l’épaisseur du matériau, il est envisageable d’utiliser des tôles plus fines. Mais les machines deviennent alors plus complexes à fabriquer et les tôles plus chères à l'achat. Les chercheurs du laboratoire SATIE ont décidé d’étudier plusieurs types de traitements mécaniques, en l’occurrence un laminage très léger, de manière à modifier les propriétés du matériau et à diminuer les pertes à fréquence élevée. « Nous savions que ce type de traitement allait augmenter les pertes à basse fréquence. La problématique était d’identifier un traitement adéquat et la fréquence à partir de laquelle on observait une baisse des pertes », explique Frédéric Mazaleyrat. Leurs résultats montrent qu’avec une phase de laminage légère et un traitement thermique adéquat pour contrôler la détente des contraintes engendrées par le laminage, les pertes sont nettement réduites lors d’une utilisation à haute fréquence.

Une compréhension cruciale des phénomènes impliqués

Jusqu’à peu, les industriels fabriquaient des matériaux avec divers grades de qualité qui étaient ensuite choisis par les fabricants de machines électriques. Désormais, le paradigme s’inverse : c’est l’application envisagée qui détermine les propriétés d’un matériau, et le fabricant développe le matériau adéquat. Ce nouveau paradigme ne fonctionne que s’il y a une bonne compréhension des phénomènes mis en jeu et de la relation existant entre les traitements mécaniques et thermiques et les pertes, comme c’est le cas des chercheurs du SATIE. « On ignorait à quelle fréquence on obtiendrait l'amélioration, mais on avait une idée très précise et qualitative du phénomène. On savait qu'on obtiendrait un bénéfice à partir de certaines fréquences », conclut Frédéric Mazaleyrat.

 

Référence : F.J.G.Landgraf et al.  Loss decomposition in plastically deformed and partially annealed steel sheets. Journal of Magnetism and Magnetic Materials, Volume 502, 15 May 2020, 166452