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Christine Baldeschi : greffer de la peau

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 28 juin 2019 , mis à jour le 07 mai 2021

Dans son laboratoire de l’Institut des cellules souches pour le traitement et l'étude des maladies monogéniques (i-Stem – Inserm/Université d’Évry), Christine Baldeschi fabrique des cellules de la peau à partir de cellules souches dans le but de greffer un épiderme sur des patients souffrant de maladies génétiques rares de la peau. Des essais cliniques imminents constituent une « première » mondiale.

Affilié à l’AFM Téléthon, l’i-Stem est un laboratoire universitaire créé par Marc Peschanski en 2005. Les équipes travaillent sur le traitement et la compréhension des maladies génétiques à partir de cellules souches d’origine embryonnaire, ou induites à la pluripotence, prélevées sur le patient. Depuis douze ans, Christine Baldeschi y dirige l’équipe qui étudie les génodermatoses, des maladies génétiques rares de la peau. À partir de protocoles, la chercheuse réalise soit de la thérapie cellulaire, soit de la modélisation pathologique de maladies génétiques de la peau, en vue de trouver des traitements.

Des cellules immortelles et pluripotentes

Les cellules souches embryonnaires, prélevées entre cinq à sept jours après la fécondation in vitro et mises en culture « ont deux caractéristiques : elles sont d’une part « immortelles » et s’auto-renouvellent indéfiniment, et d’autre part « pluripotentes », c’est-à-dire qu’elles vont donner tous les types cellulaires de l’organisme : cerveau, peau, muscle… », explique Christine Baldeschi, qui développe des protocoles pour différencier ensuite ces cellules souches pluripotentes en cellules de la peau, kératinocytes, mélanocytes ou fibroblastes.

Greffer un épiderme à l’horizon 2022

Une fois différenciées en kératinocytes, les cellules vont servir à reformer un épiderme. « Nous mettons actuellement en place un essai clinique qui permettra de greffer un épiderme sur des patients atteints de drépanocytose. Cette maladie génétique rare touche un enfant sur 30 000 et provoque des ulcères aux jambes. Il n’existe aujourd’hui aucun traitement. » L’idée est d’utiliser cette peau reconstituée in vitro comme d’un pansement cicatrisant. Les protocoles de production de cellules compatibles avec l’Homme sont actuellement testés avec l’industrie pharmaceutique. « Nous n’avons jamais été aussi près de pouvoir traiter des patients », se réjouit la chercheuse.

Reprogrammer les cellules

Christine Baldeschi réalise aussi de la modélisation pathologique sur l’épidermolyse bulleuse, une autre maladie génétique rare qui touchent les enfants et qui est responsable du décollement de leur peau. « Dans ce cas, nous appliquons directement un cocktail de facteurs de transcription aux cellules sanguines du patient. Ce cocktail les reprogramme à l’état pluripotent et les cellules obtiennent les mêmes caractéristiques que les cellules souches embryonnaires », explique la chercheuse, qui travaille directement avec l’équipe médicale de l’hôpital Necker. « En étudiant les kératinocytes malades, nous essayons de comprendre les mécanismes moléculaires associés à cette maladie dans le but de faire du criblage pharmacologique : nous testons des médicaments existants pour tenter de trouver la bonne formule thérapeutique. »

Nice, Glascow, Évry

Après un master de biologie cellulaire et moléculaire à l’université Nice Sophia Antipolis, Christine Baldeschi poursuit par une thèse, dont le sujet porte déjà sur une maladie génétique de la peau. Elle la soutient en 2004 et part en post-doctorat à Glascow. Elle revient plus tôt que prévu en France, à l’Université d’Évry, où elle obtient un poste de maître de conférences en septembre 2006, à l’âge de 29 ans ! Un an plus tard, elle prend la direction de son équipe actuelle à l’I-Stem. « J’ai tout de suite bénéficié de la confiance du directeur de l’Institut. » Aujourd’hui la jeune chercheuse est responsable du M2 biothérapies tissulaires, cellulaires et géniques et transmet à son tour le flambeau de la recherche. « C’est une grande fierté de savoir qu’une de mes étudiantes a été admise à Harvard en post-doctorat ! »

Christine Baldeschi