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Julie Poulain : le corail, un animal en voie de disparition

Portrait de chercheur ou chercheuse Article publié le 28 juin 2019 , mis à jour le 07 mai 2021

Julie Poulain travaille sur la génomique environnementale des milieux marins et exerce au Genoscope (CEA/CNRS/Université d’Évry) depuis presque vingt ans. Elle revient de l’expédition Tara Pacific, pour laquelle elle a participé à la conception et la mise en œuvre des protocoles d’analyse de génomique et a été impliquée dans la logistique scientifique de la collecte des coraux de l’Océan Pacifique.

« Je suis ingénieure de recherche, pas chercheuse » tient d’emblée à préciser Julie Poulain, dotée d’un parcours sinueux avant l’obtention de son DEA d’écologie microbienne appliquée aux sols et milieux aquatiques, et de trouver sa voie. Elle est aujourd’hui un appui indispensable aux travaux de ses collègues chercheurs du Genoscope, qui l’associent toujours à leurs publications. « Je me sens à ma place dans le rôle de l’ingénieur qui aide le chercheur à répondre à ses questions scientifiques. »

A bord du Tara

De mai 2016 à octobre 2018, Julie Poulain a embarqué à bord de la goélette Tara pour sa 4e expédition majeure, Tara Pacific, consacrée à l’étude de la capacité d’adaptation des récifs coralliens au changement climatique. Ce consortium public-privé poursuit notamment un objectif de recherche de très haut niveau sur l’Océan. En collaboration avec Rainer Freidrich de la société World Courier, Julie Poulain a géré l’approvisionnement du bateau en consommable scientifique et le transfert des échantillons du bateau à Genoscope. « Mon rôle consistait à me tenir informée de l’état des stocks des consommables et réactifs utilisés pour la collecte, et la préservation des échantillons et à expédier le nécessaire lors des escales » explique-t-elle.

Drôle d’animal

Tara Pacific s’intéresse à l’écosystème corallien : le corail et la zooxanthelle, une micro-algue qui vit en symbiose avec lui et est indispensable à sa survie (elle lui fournit 90% de son énergie). Le bateau a sillonné l’Océan Pacifique pour collecter des échantillons de coraux de trois espèces dans des environnements physiologiques différents. L’objectif est de comprendre leurs mécanismes de résistance et de résilience. « On parle de blanchiment du corail lorsque sa micro-algue le quitte. Si la rupture de symbiose dure trop longtemps, il finit par mourir. Nous souhaitons donc étudier comment ils interagissent entre eux et avec le microbiote. »

Une ressource pour l’humanité

« Les coraux sont très importants pour l’humanité, les récifs coralliens assurent la protection des côtes contre la puissante houle océanique. Ils constituent, via le tourisme, une ressource économique pour les populations du Pacifique et sont surtout un important réservoir de biodiversité. Alors, même si le premier objectif demeure la recherche fondamentale, nous n’oublions pas de sensibiliser les populations locales à leur préservation », indique Julie Poulain.

Veiller sur le trésor

Après l’avoir réceptionné et inventorié scrupuleusement, Julie Poulain se retrouve aujourd’hui à la tête d’un stock de 37 000 échantillons, très convoités. Avec son équipe, l’ingénieure les re-distribue vers les laboratoires qui collaborent aux recherches, sur place pour la génomique, ou ailleurs pour d’autres secteurs (microscopie, chimie). Elle veille à leur traitement, gérant les priorités de séquençage en lien avec le consortium TARA Pacific et le laboratoire de séquençage du Genoscope.

Un MinION sur le bateau

En marge des objectifs de l’expédition, Julie Poulain s’est vue confier l’expérimentation d’un séquenceur nouvelle génération. Basé sur l’utilisation de nanopores, le MinIon permet de faire du séquençage in situ et d’avoir des données quasiment immédiatement. « On peut donc rapidement orienter la collecte en fonction des résultats obtenus et éviter de faire du stockage d’échantillons », explique Julie Poulain qui a à nouveau testé le MinION dans le cadre d’une autre mission océanographique sur les fonds marins en Atlantique Nord. « On connait mieux la planète Mars que les abysses ! », remarque-t-elle, déjà prête à repartir.