Quandela, le CNRS, l’Université Paris-Saclay et l’université Paris Cité ont inauguré le 13 novembre 2024 au Centre de nanosciences et nanotechnologies (CNRS/Université Paris-Saclay/Université Paris Cité) le laboratoire commun QDlight dédié à la recherche en photonique quantique, ou l’art de maîtriser la lumière dans le régime quantique au sein de dispositifs à l’échelle nanométrique. Pour une durée de six ans, les équipes entendent renforcer la coopération scientifique afin de développer une nouvelle génération d’émetteurs de lumière quantique, ainsi que leurs applications dans les technologies de l’information quantique pour une puissance de calcul sans précédent.
La photonique quantique, ou l’art de maîtriser la lumière dans le régime quantique
Développée depuis la fin du XX e siècle, la photonique quantique consiste à tirer profit des propriétés spécifiquement quantiques de la lumière, notamment des photons uniques (émis un par un), pour le calcul quantique et la sécurisation des communications. Cette discipline offre l’une des voies les plus prometteuses pour l’informatique quantique (ordinateurs et réseaux quantiques) ou encore pour des protocoles inviolables de distribution de clé de chiffrement (cryptographie quantique).
Société leader européen du calcul quantique photonique et issue du Centre de nanosciences et nanotechnologies (C2N-CNRS/Université Paris-Saclay/Université Paris Cité), Quandela produit et commercialise en Europe depuis 2017 des émetteurs de lumière quantique, des composants indispensables aux technologies de calcul quantique photonique, et a livré ses premiers ordinateurs quantiques photoniques en 2023. Ces émetteurs, constitués d’une boîte quantique que l’on peut voir comme un atome artificiel dans une matrice de matériau semi-conducteur, permettent de générer en série des photons uniques, indiscernables les uns des autres et émis à la demande par une succession d’impulsions laser concentrées sur cet atome artificiel.
Dans les meilleures conditions de résonance et d’extraction des photons conférée par la cavité optique dans laquelle elles sont positionnées, ces boîtes quantiques permettent de générer un flux de photons à une cadence de plusieurs dizaines de mégahertz, qui sert à implémenter efficacement des protocoles de calcul quantique sur une puce photonique.
Vers une puissance et une efficacité de calculs sans précédent
Ce nouveau laboratoire commun (Labcom) recherche-entreprise vise à développer des émetteurs et protocoles pour générer de nouveaux états de lumière quantique, dans la perspective de réaliser un ordinateur quantique photonique(1) tolérant aux erreurs et permettant de démontrer des protocoles de communication quantiques.
Pour ce faire, les travaux s’inscriront dans deux axes de recherche :
- L’axe « optique » du projet visera en premier à développer des protocoles d’intrication quantique photonique(2), afin de créer des chaînes et des graphes de photons multi-intriqués. Ces états de lumière non classiques sont au cœur du paradigme du calcul quantique « basé sur la mesure » qui est le cadre le plus prometteur pour réaliser une machine quantique universelle.
- L’axe « croissance » sera centré sur l’amélioration de la qualité des dispositifs photoniques à boîte quantique qui seront réalisés au sein du Labcom. Il s’agira notamment de faire croître des matériaux de très haute pureté, afin de maîtriser la « pureté quantique » des photons et ainsi d’accroitre la reproductibilité de fabrication des dispositifs photoniques.
QDlight, la poursuite d’une étroite collaboration recherche publique-entreprise
Ce laboratoire commun s’inscrit dans la continuité de la collaboration depuis 2017 entre Quandela et le laboratoire de recherche dont elle est issue, le Centre de nanosciences et nanotechnologies (C2N). Elle s’est traduite par de nombreuses interactions entre acteurs et actrices de la recherche publique et en entreprise au profit de la recherche fondamentale sur la physique des boîtes quantiques de semi-conducteurs, de l’interaction lumière-matière dans les microcavités solides, des protocoles de génération de lumière quantique et de leur mesure, ainsi que sur des premières implémentations de protocoles ou calculs quantiques.
Le Labcom QDlight représente une nouvelle étape pour conserver une avance compétitive au niveau mondial sur la technologie des sources de photons uniques semi-conductrices, assurer leur perfectionnement constant et exploiter leurs propriétés exceptionnelles dans les activités de recherche et de développement.
Notes :
- Un ordinateur quantique est une machine qui utilise des bits quantiques ou « qubits » (ici, des photons uniques) qui présentent deux états 0 ou 1 pouvant être exploités simultanément en formant des superpositions cohérentes de 0 et 1 (au sens de la mécanique quantique) tandis que son homologue classique traite l’information sous forme binaire (soit 0, soit 1). La puissance de calcul croît exponentiellement avec le nombre de qubits pour une machine quantique, et pour certaines tâches, dépasse celle des meilleurs supercalculateurs classiques pour une cinquantaine de qubits seulement.
- Nommé par Einstein « l’action fantôme à distance », l’intrication quantique est un phénomène dans lequel deux particules, dans ce cas précis deux photons, forment un système d’interdépendance et de corrélation de leurs propriétés physiques observées, quelque que soit la distance qui les sépare.