Alors que les industries cherchent à réduire leur empreinte carbone et environnementale, l’entreprise Novecal propose des services et des produits innovants, en particulier dans le domaine de la catalyse.
L’histoire de Novecal commence en 2010, lorsque Cyril Martini, alors post-doctorant en chimie, rejoint l’équipe du chercheur Vincent Huc, spécialisée en chimie moléculaire au sein de l’Institut de chimie moléculaire et des matériaux d’Orsay (ICMMO – Univ. Paris-Saclay / CNRS). « Au cours de nos recherches, nous avons découvert l’existence de calixarènes géants, des oligomères cycliques dont la taille peut atteindre plusieurs nanomètres. À la suite de cela, nous avons développé nos premiers catalyseurs en utilisant les calixarènes comme support, dans un contexte académique », explique Cyril Martini, président de Novecal.
Leurs travaux sont financés grâce à des concours d’innovation et à partir de 2015, les chercheurs réalisent pendant deux ans un projet de maturation avec la SATT Paris-Saclay. Dans la foulée, plusieurs brevets sont déposés, dont l’un s’applique au domaine de la catalyse. En 2017, Cyril Martini est lauréat du concours i-Lab proposé par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, et reçoit une subvention de 225 000 €. Son projet est alors incubé au sein d’IncubAlliance.
C’est dans ce contexte qu’il fonde la start-up Novecal l’année suivante, en 2018, avec Emmanuelle Schulz et Vincent Huc. L’entreprise est d’abord accueillie au sein de l’ICMMO, puis déménage en juin 2022 dans l’un des bâtiments du campus d’Orsay. En 2021, la jeune pousse est lauréate du concours « Entreprises engagées pour la transition écologique » de l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe). Novecal regroupe aujourd’hui trois chercheurs et une stagiaire en opérationnel.
Développer des catalyseurs
La principale activité de Novecal est la conception, la recherche, le développement et la production de catalyseurs. Les calixarènes sont des molécules cycliques possédant classiquement entre quatre et huit motifs répétitifs. Ils sont par exemple utilisés pour piéger les éléments radioactifs. Ils peuvent également servir à encapsuler des molécules organiques. « Nous avons eu l’idée de recourir à des calixarènes géants comme support pour générer des catalyseurs. Cela afin de limiter la contamination des intermédiaires et des principes actifs pharmaceutiques par les métaux contenus dans les catalyseurs. Finalement, le concept a fonctionné avec un calixarène de plus petite taille, plus simple à produire. Les catalyseurs, en général à base de palladium, sont intégrés sur chaque motif du calixarène », précise le président.
Le principal atout de ce type de catalyseur reste qu’il peut être conçu en phase homogène et servir en catalyse hétérogène, grâce au choix du solvant. Cela présente plusieurs avantages : les performances sont reproductibles, il est possible de récupérer le métal par simple filtration et de fortement réduire leur contamination dans les intermédiaires et les produits finis. Les métaux rares sont ainsi recyclés et la réaction chimique simplifiée à l’échelle industrielle.
Novecal a déjà créé plusieurs générations de ces catalyseurs innovants. Elle les propose sur catalogue ou à travers des distributeurs au sein de l’Union européenne. Bien que l’industrie pharmaceutique représente la majorité des clients de Novecal, « les catalyseurs sont parfois compliqués à vendre, car les compagnies qui fabriquent des médicaments sont très frileuses lorsqu’il s’agit de collaborer avec des petites entreprises comme la nôtre, en raison d’une crainte sur l’approvisionnement notamment », se désole Cyril Martini. Il ajoute : « La valeur ne doit pas seulement être prise en compte à travers le ratio efficacité/prix. Nos produits sont plus chers, mais ils permettent de faire des économies sur tout le cycle de fabrication, en limitant l’utilisation de solvant, le nombre d’analyses, la main-d’œuvre et en libérant des outils de production. Ce sont des éléments qui sont difficiles à valoriser auprès des investisseurs et des cadres de la R&D pharmaceutique. »
Plusieurs projets en parallèle
Novecal, malgré son petit effectif, s’affaire toujours sur plusieurs travaux à la fois. L’entreprise collabore actuellement avec un géant de la chimie. Il s’agit de développer un catalyseur pour fabriquer des produits de commodité. « La valeur ajoutée est faible dans ce marché, mais les volumes sont très importants. Notre innovation a été testée et approuvée, elle fonctionne très bien. Le catalyseur se recycle en boucle et n’encrasse pas le réacteur, ce qui a des conséquences environnementales et économiques intéressantes. Un nouveau brevet sera bientôt déposé », se félicite Cyril Martini. Si le projet arrive à terme, cela pourrait rapporter entre 0,5 % et 2 % des ventes brutes générées par le partenaire.
La jeune entreprise commence également un projet sur le développement de catalyseurs homogènes en collaboration avec l’Université Paris-Saclay et le CNRS. « Ici, nous nous attaquons aux réactions dites d’activation C-H (carbone-hydrogène). L’objectif est de raccourcir les étapes de synthèse des principes actifs pharmaceutiques et agrochimiques. Au lieu d’employer des intermédiaires portant une fonction halogène et/ou un dérivé métallé, on peut réaliser les réactions de couplage directement à partir des précurseurs. L’enjeu économique et environnemental est considérable pour l’industrie. Les premiers résultats sont très encourageants », ajoute le président. Novecal n’en est encore qu’à ses débuts, mais les premiers catalyseurs homogènes fabriqués permettent déjà de diviser par 100 la quantité de catalyseur utilisée dans des réactions de couplage C-C (carbone – carbone) ou C-N (carbone – azote).
De la recherche et développement sur mesure
En plus de son activité de conception, synthèse, développement, production et vente de catalyseurs, Novecal propose aussi une offre de services de recherche et développement afin de résoudre des problématiques industrielles, de montée en échelle et des synthèses à façon, et de mettre au point des synthèses totales de principes actifs. « Nous optimisons par exemple des réactions de catalyse en testant des catalyseurs dans différentes conditions, en modifiant le solvant, la température, la base… », précise Cyril Martini. Pour y parvenir, l’équipe dispose de nombreux équipements : évaporateurs rotatifs, dont un de type industriel avec une capacité de 20 litres, réacteurs thermostatés de volume similaire.
Lors d’un précédent projet, Novecal a développé une technologie à partir d’une huile capable de modifier la viscosité de formulations par simple traitement thermique. Cette technologie est aujourd’hui utilisée à grande échelle par l’industrie des matériaux.
Novecal vient également de terminer un autre sujet pour une compagnie indienne. « Il s’agissait de réaliser la synthèse totale d’un composé naturel. Nous sommes partis de zéro pour tracer la voie de synthèse. Cela nous a pris quatre mois, ce qui est un exploit en termes de rapidité », se félicite le président de la start-up.
À l’heure actuelle, la jeune entreprise se concentre sur un projet avec une grande entreprise française qui souhaite améliorer une étape de catalyse. « Il s’agit d’une catalyse enzymatique qui demande énormément d’eau et près de quatre semaines. Notre but est de réduire cette étape à quelques heures en utilisant des catalyseurs plus classiques », développe Cyril Martini. Il poursuit : « Cela reste compliqué de se faire un nom dans le milieu, de trouver des clients. Notre force commerciale et marketing est très limitée. Mais c’est toujours une fierté d’arriver à fabriquer des produits ou de réaliser des prestations qui ont des retombées concrètes dans la société. »